83390 Cuers
France
Quand elle commence à comprendre que la vie de sa fille ne sera pas tout à fait comme celle des autres enfants, Virginie entame les démarches pour lui fournir l’accompagnement dont elle a besoin. PAI, PPS, dossier MDPH, AEEH, PCH… Un monde de démarches dont elle se serait bien passée s’ouvre alors à elle.
Ma fille Loann est née grande prématurée. Très tôt, elle a subi une batterie de tests, elle a fêté son premier anniversaire à l’hôpital, et a été diagnostiquée à un an et demi. Elle souffre d’une maladie rare, le syndrome d’Alagille, une maladie qui touche le foie. À onze ans et demi, elle a déjà été greffée deux fois. Lors de l’une des opérations, un nerf a été atteint, ce qui entrainé des troubles psychomoteurs, elle a besoin d’un fauteuil roulant pour les longues distances.
Le PAI, première étape d’une longue série de démarches
La première démarche à laquelle on a été confrontés, c’est le PAI - projet d’accueil individualisé. Le PAI, c’est un document qui décrit les besoins spécifiques de son enfant pour son accueil en collectivité, en crèche ou à l’école. Dans notre cas, Loann ne peut pas manger trop salé, elle ne peut pas manger d’agrumes non plus, à cause de sa greffe. On joint au PAI un certificat médical, les ordonnances, une trousse de secours si nécessaire, les protocoles en cas d’urgence : que faire si Loann ingère un aliment qu’elle ne peut pas manger ? À quel hôpital se rendre s’il y a un souci ? Le PAI peut concerner n’importe quel enfant, handicapé ou non, à ce stade, il n’y a pas encore besoin d’avoir fait les démarches auprès de la MDPH.
Le dossier MDPH, l’entrée dans le monde du handicap
Le dossier MDPH, on y pense quand on commence à sortir la tête de l’eau, quand on n’est plus dans l’urgence des hospitalisations. On commence à réaliser que la vie va être différente pour son enfant, qu’elle va avoir besoin d’aménagements pour poursuivre sa scolarité. Nous ça a été au moment de l’entrée en primaire. Au début, mon mari était plutôt dans le refus du handicap, le mot en lui-même lui posait un problème. Les démarches auprès de la MDPH, il n’en voyait pas l’intérêt. Alors que moi, je me disais que Loann avait des besoins spécifiques, et ça ne me gênait pas de parler de handicap.
Plus Loann avançait dans la maladie, plus les besoins d’appareillage (pour elle et pour la maison) se sont fait sentir. C’est important de faire le dossier MDPH à ce moment-là pour obtenir une aide financière, dans notre cas pour l’aménagement d’une rampe dans l’escalier par exemple. Une assistante sociale est venue à la maison pour estimer les besoins de Loann, pour évaluer combien de temps dans la journée, je passe à l’assister sur son handicap. A ce moment-là, il ne faut pas hésiter à parler de tout ce que l’assistante sociale ne va pas voir lors de sa visite, s’il y a des soucis la nuit par exemple. Il est aussi possible de préparer un document avec une journée type un jour d’école et une journée type sans école. Le compte-rendu de cette assistante sociale va dans le dossier MDPH. Il faut aussi ajouter un certificat de la part de chaque praticien qui a affaire à l’enfant, même si ça n’est pas demandé, ça aidera les personnes qui évaluent le dossier à comprendre au mieux ses difficultés. J’ai aussi indiqué ce que je ne savais pas à l’époque, quels sont les examens et les tests en cours.
On rédige aussi le projet de vie de l’enfant. J’ai eu la chance de rencontrer rapidement l’AMFE (Association Maladies Foie Enfant) et l’association tous derrière Léa. Cela m’a permis d’être moins seule et d’être soutenue dans les démarches. Au début, je ne savais pas à quoi Loann pouvait prétendre ou non. Par exemple, on ne pense pas forcément au prêt d’ordinateur, ou à une « souris scanner » (une souris qui scanne le document quand on la passe dessus) qui permettent à l’enfant de gagner du temps. C’est en parlant avec d’autres parents que j’ai entendu parler de ces outils. Après le passage en commission, j’ai dû choisir entre le complément de l’AEEH(Allocation d’Education de l’Enfant Handicapé) et la PCH(Prestation de Compensation du Handicap), là encore c’est mieux d’être épaulé!
Anticiper au maximum les démarches
On a tendance à penser que lorsque la MDPH accorde quelque chose, comme la présence d’une AVS (Auxiliaire de Vie Scolaire, aussi appelée AESH pour Accompagnants d'Elèves en Situation de Handicap), c’est forcément gagné. Mais quand j’ai eu besoin d’augmenter les heures d’AVS pour Loann, sur le papier ça a été validé, mais dans les faits ça n’a pas suivi. Je n’ai rien lâché et j’ai contacté l’Inspection Académique pour faire respecter la notification MDPH.
Il ne faut pas hésiter à réagir si l’état de l’enfant se dégrade, s’il le faut, refaire un dossier MDPH, même si le précédent est valable. Cela évite que l’enfant soit « coincé » avec un accompagnement qui ne lui convient pas.
Dans le cas de Loann, sa scolarisation à l’école devenait de plus en plus compliquée. Elle prenait du retard en raison des hospitalisations et de sa fatigabilité, et en même temps pour moi sa place n’était pas en ULIS pour autant. Elle n’a pas un retard mental, mais un retard scolaire car elle a manqué énormément de cours. Il existe des SAPAD (Services d'Assistance Pédagogique à Domicile), mais c’est trop peu d’heures : trois heures par semaine au maximum, deux en période de Covid. Pour elle, la meilleure solution c’est actuellement le CNED, une solution flexible et bien organisée. Je fais donc l’école à la maison. Loann envoie ses devoirs (écrits ou oraux) à un interlocuteur, et il y a toujours quelqu’un pour répondre aux questions.
Des démarches pour faire reconnaitre mon statut d’aidant familial
La maladie de ma fille a bien sûr eu un impact sur ma vie professionnelle. Ma fille a onze ans et demi et je me suis arrêtée de travailler huit ans, au rythme de ses hospitalisations et de son état de santé. Je n’ai jamais voulu être mère au foyer, ça n’est pas mon choix, j’aime travailler ! Au début, je me suis mise en arrêt pour m’occuper d’elle, puis j’ai été déclarée inapte. Aujourd’hui je touche la PCH en tant qu’aidant familial. J’ai le statut d’aidant familial jusqu’en 2023, après, il faudrait que Loann reprenne l’école, j’espère qu’à ce moment-là elle en sera capable.
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« Force et courage ! »
Même dans les moments où l’on ne voit pas de solutions, on trouve la force dans le regard de notre enfant, car elle, elle n’a pas le choix.
« Ne pas avoir peur quand tout semble compliqué. » Quand on ne sait pas, ne pas avoir honte de demander de l’aide, à ses proches ou à l’extérieur, auprès d’une association par exemple.
« Ne pas avoir peur de défendre l’avenir de son enfant, si les décisions ne conviennent pas ». Un autre conseil serait de ne pas hésiter à faire appel, c’est nous qui connaissons le mieux notre enfant !
« Guetter chez soi-même les signaux d’alerte et essayer de garder du temps pour soi. ». C’est ironique, parce que c’est un conseil que je n’arrive pas à m’appliquer. J’ai fait un burn-out, sans l’avoir vu venir. On est vite débordé, alors qu’on aurait pu déléguer. Quand on se sent prêt, on peut tester des temps de répit, à son rythme, pour le faire en confiance.