France
De la première consultation chez le médecin traitant aux phases de tests en consultation mémoire, voici comment se déroule le diagnostic de la maladie d’Alzheimer
En France, un patient atteint de la maladie d’Alzheimer sur deux ne serait pas diagnostiqué. “C’est un préjudice important quand on sait qu’il n’y a que 400 000 personnes prises en charge à 100% par la Sécurité Sociale pour cette maladie sur les 1 200 000 estimées sur le territoire”, regrette le Dr Véronique Lefebvre Des Noettes. Parmi les principales causes de non-recours au diagnostic, figurent notamment, “la peur, le déni et l’oubli”.
Médecin traitant : la première étape du diagnostic Alzheimer
En effet, à ce jour, il n’y a pas de traitement qui permette de guérir la maladie d'Alzheimer. Un diagnostic confirmé peut valider des craintes déjà redoutées par les proches ayant constaté des changements associés au trouble et par celui dont la compréhension de ses actes commence à lui échapper. Il est aussi synonyme d’un pronostic et d’une réalité des conséquences évolutives qui vont bouleverser la vie familiale et sociale. Mais le diagnostic permet également de donner une explication à ce qui arrive, une visibilité et une estimation sur les prochaines étapes pour lesquelles il existe des prises en charge, des aides et des dispositifs afin d’améliorer la qualité de vie du patient et de ses proches aidants.
“Diagnostiquer la maladie tôt permet de repousser l’évolution des effets négatifs et l’entrée en institution de près de trois ans”, ajoute la spécialiste. Cela peut aussi permettre de rassurer tout simplement. “On peut avoir tendance à suspecter la maladie d’Alzheimer pour des signes assimilés, mais dont la gravité n’est pas associée à un trouble neurodégénératif.”
→ En savoir plus sur les premiers signes qui doivent pousser à consulter
Que les symptômes soient flagrants ou non, au moindre doute, il ne faut pas hésiter à demander un avis. Le médecin traitant est le premier interlocuteur à consulter dans une démarche de diagnostic Alzheimer. Après l’écoute du patient et de ses proches, il va décider si la situation nécessite un bilan complet pour écarter un risque d’une autre pathologie ayant des symptômes cliniques similaires ou poursuivre le parcours avec une consultation mémoire de proximité.
La consultation mémoire
À partir du moment où la poursuite du diagnostic est prescrite par un médecin généraliste, elle sera prise en charge à 100% par la Sécurité Sociale.
Les consultations mémoires peuvent être faites :
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Dans un hôpital public (il y en a plus de 400 disponibles un peu partout en France),
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Au cabinet d’un spécialiste libéral habilité (neurologue, gériatre, psychiatre).
“On débute par une consultation d’une heure et demi”, nous explique le Dr Véronique Des Noëttes, qui a plus de 32 ans d’expérience à l’hôpital public en gérontologie et particulièrement en consultation mémoire. “Dans un objectif de débrouillage, je passe d’abord en revue les difficultés du patient corroborées par le proche. J’effectue une sorte de biographie du patient. Je m’intéresse à sa vie, ses antécédents familiaux, les professions exercées, la présence de cas avérés ou non d’Alzheimer dans sa famille. J’essaye également de déterminer si les signes constatés ne pourraient pas plutôt traduire une dépression, une autre forme de démence ou un trouble neurologique.”
À la fin de ce premier point, il y a trois issues possibles :
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Si l’évaluation écarte toute suspicion d’Alzheimer un rendez-vous de suivi sera déterminé l’année suivante,
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Si le spécialiste diagnostique une autre pathologie, il avertit le médecin traitant qui orientera le patient vers des soins appropriés,
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Si l’hypothèse de la maladie d’Alzheimer semble se confirmer, le sujet devra effectuer d’autres tests médicaux en hôpital de jour.
Une phase de tests en hôpital de jour
Rappelons que le diagnostic de maladie d’Alzheimer est possible ou probable et doit s’appuyer sur un faisceaux d’examens complémentaires et des tests neuropsychologiques afin de l’étayer. “Ce sont des tests assez longs qui sollicitent plusieurs spécialistes et qui peuvent fatiguer une personne âgée, c’est pourquoi il est fréquent de les faire en deux ou trois fois.” Au cours de ces journées d’examens, le patient devra notamment effectuer :
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Une IRM : pour détecter d’autres troubles du cerveau qui pourraient être responsables des difficultés du proche, ou évaluer la taille de certaines zones cérébrales, comme l’hippocampe, pour indiquer à quel stade en est la maladie,
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Un bilan sanguin : pour détecter d’autres pathologies en lien avec les troubles du patient,
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Une ponction lombaire : non systématique, elle peut être utilisée pour vérifier la présence des deux protéines anormales responsables de la maladie et si besoin de confirmer le diagnostic pour des formes atypiques ou précoces, par exemple,
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Un bilan cardiaque : la maladie d’Alzheimer n’est pas seulement neurodégénérative, elle peut être mixte incluant des facteurs vasculaires,
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Un bilan neuropsychologique complet : pour détecter et évaluer l’état d’avancement du déclin cognitif à travers des questions, mais aussi plusieurs tests de tâches à effectuer comme une analyse de la fluence verbale (capacité à trouver ses mots), des tests de compréhension, ou l’évaluation de la capacité à effectuer une double tâche simple.
Dans le cas où le diagnostic (de probabilité) est confirmé, tous les spécialistes devront communiquer les éléments permettant de détailler l’état d’avancement et les particularités de l’état du patient, au médecin traitant. Ce dernier deviendra le coordinateur entre le patient, ses proches et les professionnels de santé qui vont les accompagner tout au long de l’évolution du protocole de soins.
Si le proche refuse de se faire diagnostiquer
Il est très fréquent que l’aidant doive faire face aux réticences, voire au refus total de son proche en évoquant un début de démarches diagnostiques pour la maladie d’Alzheimer. Ce dernier peut ne pas avoir conscience de ses difficultés, avoir des craintes à confirmer le diagnostic ou effectuer des analyses médicales. “Dans ce cas, on peut proposer un bilan complet en hôpital de jour qui n’est pas la consultation mémoire, conseille notre interlocutrice. On propose au proche d’effectuer un examen de prévention « bien vieillir » pour vérifier l’état de santé du cœur, l’audition, le fonctionnement des muscles, puis du cerveau et on profitera de cette occasion pour poser quelques questions sans évoquer en priorité la maladie d’Alzheimer. De votre côté, vous pouvez aussi lui dire que, vous aussi, vous avez besoin d’un bilan complet et qu’il serait une bonne idée de l’effectuer ensemble.”
Si vous avez du mal à trouver un médecin traitant
Si vous n’avez pas de médecin traitant ou que vous rencontrez des difficultés pour en trouver un, le Dr Véronique Des Noëttes conseille de se tourner vers des solutions de proximité destinées à orienter et résoudre les situations de parcours complexes :
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Une “consultation bien vieillir” : prise en charge par la Sécurité Sociale, cette consultation globale de santé de prévention se fait en hôpital de jour (adressez-vous directement à votre hôpital de proximité pour vous inscrire). Elle est effectuée par un collège de spécialistes, dans le but de repérer les troubles et difficultés naissantes chez les seniors (troubles de l’équilibre, de la mémoire, du sommeil etc.), sur place vous pourrez obtenir une orientation soit vers un médecin traitant qui pourrait débuter le suivi de votre proche, soit directement vers une consultation mémoire de proximité.
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Les Dispositifs d’Appui à la Coordination (DAC) : créés pour accompagner patients et professionnels dans des cas de parcours de santé complexes,
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Les Centres Locaux D’Information et de Coordination (CLIC) : ces points d’accueil locaux ont pour mission de renseigner et orienter les seniors et leurs aidants sur les solutions d’accompagnement à la perte d’autonomie, les aides financières et les aides à domicile.
→ Trouver les CLIC et DAC les plus proches de chez vous
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