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L’acceptation du handicap de son enfant, suite à un diagnostic est nécessaire pour accompagner au mieux son enfant. Pour y arriver, il faut souvent passer par des étapes semblables à un deuil parental. Quelques clés pour les reconnaître et les surmonter.
Il y a, à peu près, autant de façons de vivre l’annonce du diagnostic de son enfant que de façons de l’apprendre. Dans tous les cas, l’acceptation et la reconnaissance de la différence de son enfant et des difficultés auxquelles il fait face sont nécessaires. Elle permet d’être au clair avec ses émotions et d’apprendre à connaître le handicap et son évolution afin d’apporter l’aide et l’accompagnement en fonction des besoins de l’enfant. “Il est aussi important de connaître les répercussions sur la vie familiale et sociale, explique Lison Fenet, psychologue clinicienne du Développement et du handicap qui intervient auprès d’enfants et d’adolescents avec un trouble du spectre de l’autisme en établissement spécialisé et dans un dispositif d’inclusion scolaire. Les professionnels qui entourent l’enfant au moment du diagnostic sont là pour transmettre les informations, mais il ne faut pas hésiter à se rapprocher d’eux pour faire part de vos questionnements et de vos émotions."
Des étapes semblables à un deuil classique
Lorsque le diagnostic intervient à la suite d’un accident, à la naissance ou au cours des premières années de l'enfant, pour les parents, le choc est associé à un deuil parental. “On parle de deuil et de traumatisme psychique, dans le sens où l’annonce du handicap vient mettre à mal la représentation que les parents s’étaient faits de leur enfant”, complète la psychologue.
Les étapes de ce deuil sont presque identiques à celles d’un deuil classique, bien que leur chronologie puisse être différente et pas forcément obligatoire d’un individu à un autre. “Il y a d’abord le traumatisme de l’annonce si on ne s’y attend pas, puis le déni. Les parents essayent généralement de trouver une explication. Il y a ensuite la désorganisation émotionnelle qui se chevauchent au cours de toutes les étapes. On se retrouve submergé par plusieurs sentiments différents. Il y a de la colère, de l’incompréhension et de la culpabilité aussi. L’étape la plus difficile est de réussir à accepter toutes ces émotions contradictoires et brutales.”
S’attendre à des ruptures de parcours tout au long de la vie
Il est impossible d’estimer la durée moyenne pour surmonter ce traumatisme et cheminer vers l’acceptation. D’abord parce que le processus est différent pour tout le monde. Ensuite parce qu’il faut s’attendre à ce que cette forme de deuil puisse ressurgir à chaque changement et impossibilité dans le parcours de son enfant. “Au cours des premières années de vie, l’enfant peut beaucoup évoluer, explique la psychologue. Ensuite, les parents peuvent parfois se projeter dans une vie avec le handicap qui sera encore différente à certains instants. Par exemple, lors des questions d’orientation scolaire lorsque le système scolaire ordinaire n’est plus en mesure de répondre aux besoins de l’enfant une orientation en milieu spécialisé peut être envisagée par les professionnels. Le retour en milieu médico-social après une scolarisation en milieu ordinaire peut faire ressurgir des angoisses pour le parent qui ont pu intervenir au moment de l’annonce du handicap ou être vécu comme un régression.”
Le déni, première étape importante à surmonter
Si l’aide psychologique n’est pas obligatoire après l’annonce d’un diagnostic, elle est fortement conseillée par les médecins. Pour accompagner les parents dans ce processus d’acceptation, Lison Fenet, insiste sur l’importance d’aller au rythme de chacun. La façon d’aborder le travail ne sera pas la même si un parent sur les deux est déjà passé à l’étape suivante ou si toute la famille est dans le déni. “Il y a des parents qui acceptent tout de suite et d’autres qui traversent une phase de déni assez longue. Dans ce cas, on essaye de ramener la personne à la réalité des choses en douceur en la mettant face aux difficultés concrètes auxquelles son enfant fait face. Puis, petit à petit, on avance vers la gestion du handicap en général.”
Dans le cas où un l’un des deux partenaires arrive plus rapidement à accepter, “on tente de passer par lui ou elle pour faire avancer l’autre. Les parents étant mieux placés pour parler de leur enfant, ça peut permettre à l’autre de se dire que le constat ne vient pas seulement d’un professionnel extérieur, mais d’une personne qui vit aussi 24 heures sur 24 avec l’enfant.”
La culpabilité : “est-ce que c’est de ma faute ?”
Avec le déni, la culpabilité fait partie des étapes, pas systématiques, mais importantes à surmonter si elles se présentent, afin d’avancer dans le processus d’acceptation. “C’est humain de vouloir trouver une origine à ce qui nous arrive”, explique Lison Fenet. Dans cette quête d’une cause précise, beaucoup de parents se demandent si la responsabilité ne leur revient pas. “Certaines mamans se reprochent d’avoir été trop actives pendant la grossesse ou d’avoir mangé quelque chose qu’il ne fallait pas. D’autres parents se lancent aussi dans des recherches génétiques.” Dans le premier cas, la psychologue, explique qu’il faut travailler avec les parents sur leurs fausses croyances afin de la déculpabiliser. Dans le cas où une analyse a démontré la cause génétique transmise par l’un des parents, la démarche est plus complexe. “C’est vraiment au cas par cas. On prend le temps de déconstruire petit à petit ce qui se passe dans la tête d’un ou des parents.”
Limiter le repli de la famille après l’annonce
“Peu importe le handicap, on constate très souvent un repli des familles sur elles-mêmes après l’annonce du diagnostic, met en garde la spécialiste. On coupe tout lien social parce que le regard des autres est difficile à accepter, parce que c’est trop compliqué de sortir et on a peur de ce qui pourrait arriver dehors.” Un renfermement qui peut mener à un isolement ou une surprotection de l’enfant. “On oublie souvent que les enfants avec handicap sont des enfants avant tout et qu’ils ont besoin de vivre des choses et c’est notre rôle, tout en prenant compte des angoisses des parents de les aider à laisser les enfants vivre leurs propres expériences.”
Pour limiter ce resserrement du noyau familial, la psychologue préconise de garder au maximum des liens sociaux avec les amis et la famille, comme avant, mais également de prendre contact avec des associations de parents. “En tant que professionnels on n’aura pas le même impact que d’autres parents qui vivent la même situation. Les groupes de parents permettent de créer du lien, de voir qu’on n’est pas seuls et apportent aussi de l’aide qui ne pouvant provenir que d’une personne qui vit cette épreuve.”
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Quand l’annonce du diagnostic est un soulagement
On parle souvent de l’annonce du handicap comme quelque chose de traumatique et bouleversant. C’est le cas lorsqu’on ne s’y attend pas, mais pour les parents en errance thérapeutique depuis des années, avoir un diagnostic peut être un véritable soulagement. Avoir la confirmation de ses doutes, qu’on ne s’est pas fait des idées sur les difficultés de son enfant, et surtout que ce n’est pas de sa faute, peut délivrer les familles d’un poids et d’une impasse aux conséquences psychologiques et sociales difficiles.
“Savoir et comprendre contre quoi on lutte nous a aussi permis de trouver des solutions”, nous a confié, Laetitia Payen, maman d’un petit garçon atteint de cyclothymie, un trouble lié à la bipolarité chez les moins de 15 ans. Pendant plusieurs années, cette maman n’a cessé de chercher une explication aux nombreuses crises de son fils. “Le plus dur, c’était de ne pas comprendre car on ne pouvait pas l’aider, car en dehors des accès de violences, on voyait bien qu’il souffrait”. Après avoir multiplié les rendez-vous et les remarques culpabilisantes sur son éducation, un diagnostic se dessine enfin et avec lui des pistes vers des traitements, des spécialistes pour aider toute la famille et la transmission de clés pour aider l’enfant à s’épanouir.
Parents d’un enfant handicapé : où trouver de l’aide psychologique ?
L’accompagnement psychologique des parents face à l’annonce du diagnostic de leur enfant n'est pas un passage obligatoire, néanmoins la proposition sera faite. Certains y ont recours immédiatement, là où d’autres vont mettre plus de temps à se décider. Il ne faut pas hésiter à vous rapprocher de l’équipe médico-sociale qui entoure votre enfant pour tout soutien ou question.
CMP (Centre Médico-Psychologique), associations de parents, maison de répit… La présence de structures de soutien et d’entraide varie beaucoup d’une région à une autre, voire même au sein des communes. Pour trouver les établissements proches de chez vous qui peuvent vous venir en aide, rendez-vous sur notre carte interactive, où se rajoutent régulièrement les solutions de proximité pour les aidants.
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Bénédicte Demmer
Source :
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Interview Lison Fenet, psychologue clinicienne du Développement et du handicap qui intervient aurpès des enfants et adolescents avec un trouble du spectre de l’autisme, en établissements spécialisés et dans une unité d’enseignement maternelle autisme.
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Interview Laetitia Payen, maman de Stanislas, jeune adolescent atteint de cyclothymie.